Chapitre 1
Processus d’élaboration de la personnalité christique et de sa sauvegarde
1.— La vie de Dieu est une histoire qui sera un jour ou l’autre vécue par tous les hommes. Elle est imprimée dans l’Ego de chaque être humain, et lors de chaque existence, nous en interprétons un épisode, un bref fragment... (suivre)
Pour mener à bien cette Œuvre, nous disposons d’une entière liberté. Notre situation peut être comparée à celle d’un chef d’orchestre qui, après avoir reçu la partition, serait libre de choisir les musiciens, les instruments ainsi que l’endroit où le concert sera interprété. La Bible nous raconte l’histoire de Dieu, elle nous annonce toutes les difficultés que nous aurons à surmonter, et nous serons successivement Abraham, l’homme qui pactise avec la divinité, les habitants de Sodome, qui reçoivent le feu du ciel, ou Joseph, vendu par ses frères ; nous traverserons la Mer Rouge, nous serons Salomon puis finalement le Christ quand notre nature humaine et notre nature divine s’uniront pour toujours.
Les Evangiles nous parlent de l’étape finale que nous aurons tous à vivre avant d’être libérés des tâches humaines ; avant d’atteindre le niveau évolutif à partir duquel nous ne serons plus obligés de revenir sur Terre. Nous serons alors les supports de la divinité et travaillerons depuis les hautes sphères au progrès spirituel de nos frères.
La Tradition admet quatre Evangiles, comme quatre sont les éléments et les lettres qui forment le nom divin : Yod-He-Vav-He. L’Evangile de St Jean correspond au Feu, celui de St. Luc à l’Eau, celui de St. Marc à l’Air et celui de St Mathieu à la Terre. Le premier est destiné à produire, à susciter la Révélation ; le deuxième s’adresse aux sentiments, le troisième à la raison et le quatrième est un résumé des trois premiers. Ils apparaissent dans la Bible dans un ordre inversé car la langue sacrée s’écrit de droite à gauche, le dernier est donc le premier.
2.— L’Ancien Testament contient notre histoire spirituelle passée, tandis que le Nouveau nous offre le récit de notre développement spirituel futur. Il en serait du moins ainsi si l’homme avait réalisé d’une façon soumise et ordonnée le programme de la divinité. Mais Adam ayant rompu les amarres qui le reliaient à Dieu, l’évolution a été vécue, en dépit du bon sens, par à-coups, un pas en avant et deux en arrière. Et actuellement, une partie de l’humanité passe sa vie à récapituler des étapes révolues, tandis que l’autre, beaucoup plus minoritaire, se trouve en avance et vit déjà des réalités programmées pour notre futur.
La naissance de l’enfant Jean sera notre naissance
3.— Dans le premier chapitre St Luc nous rapporte les étranges événements qui précédèrent la naissance de Jean Baptiste, qui plus tard serait nommé le Précurseur. Le passage (St. Luc I, 8 à 20) nous raconte que tandis que Zacharie remplissait ses fonctions sacerdotales et offrait des parfums à la divinité, l’Ange Gabriel, le chef des Anges lunaires qui s’occupent de la fécondité, lui apparut pour lui annoncer que sa femme allait mettre au monde un enfant destiné à préparer le Peuple pour qu’il observe les Commandements de Dieu. Mais Zacharie, de par son âge, se montra incrédule et Gabriel lui annonça alors qu’il perdrait l’usage de la parole jusqu’à l’accomplissement des prédictions. Plus tard, à la naissance de l’enfant ( Luc I, 59 à 64 ) sa mère l’appela Jean, en suivant le conseil de l’Ange Gabriel, et cela étonna tout le monde car personne dans la famille n’avait porté ce nom auparavant.
Ces faits nous décrivent le processus d’élaboration de la personnalité christique dans sa phase finale. La Naissance Spirituelle est l’objectif suprême de toute vie humaine ; mais avant qu’elle ne se produise, notre nature doit subir une profonde transformation. La tendance qui jusque là avait dominé en nous et avait administré les forces de notre Volonté, doit devenir muette pour céder la parole à l’enfant qui va naître, un enfant qui n’est pas encore celui qu’on attend, mais qui préparera le terrain à l’autre tendance, celle qui nous permettra de réaliser l’union du divin et de l’humain. Avant d’être Jésus, nous devons donc être Zacharie, puis Jean. En tant que Zacharie, nous devons offrir les Parfums au Seigneur, à l’heure des Parfums, comme nous le précise Luc, pour que l’Ange Annonciateur se manifeste. Les Parfums représentent les actes sublimes, capables d’atteindre les hautes sphères. Lorsque ces actes existent, quand ils ont été répétés maintes fois, comme dans un rituel, les Seigneurs d’en Haut se mobilisent et viennent nous annoncer que notre heure est proche et que notre vieille nature est sur le point d’accoucher l’enfant qui mènera le « peuple » vers Dieu. Il s’agit de notre peuple intérieur, formé par les tendances multiples qui se manifestent en nous au gré des jours et font de nous un personnage, tantôt pervers, tantôt sublime. Cette pluralité de personnalités fait que les bonnes actions que nous réalisons un jour soient démolies par les actes pervers du lendemain. Ce peuple intérieur doit se stabiliser, s’unifier. Quelle que soit la tendance « au pouvoir » dans notre psychisme, nous devons exprimer notre volonté fermement et toujours dans la même direction.
4.— Zacharie représente la phase finale de l’élaboration de la personnalité christique ; il symbolise une terre vieillie — sa femme — qui a épuisé sa vitalité et sa fécondité. En effet, cette « terre » est épuisée pour tout ce qui a trait à la matière, aux plaisirs mondains. Les désirs d’ordre matériel doivent disparaître si nous voulons entendre la voix de l’Ange qui nous annonce que le Saint Esprit nous déclare aptes à engendrer dans les mondes spirituels. Dès lors, Zacharie devient muet et l’enfant précurseur naît. Il implique une rupture totale avec notre personnalité antérieure, orientée vers la matière, et ne peut donc porter le nom d’aucun de nos « ancêtres », terme qui symbolise les tendances qui dominèrent un jour notre personnalité humaine, et les « proches » s’étonnent quand ils apprennent que l’enfant se nomme Jean.
Naissance de la personnalité christique
5.— Avant d’atteindre la phase finale de notre pèlerinage humain, avant d’être Zacharie, nous aurons à parcourir un long chemin au cours duquel nous serons à tour de rôle des personnages de conditions très différentes, que Matthieu nous présente dans le premier chapitre de son Evangile avec la généalogie de Jésus. Cette dernière commence ( Matthieu I, 1 à 17 ) avec Abraham et finit avec Joseph, époux de Marie.
Il y a en tout 42 générations qui représentent les 42 échelons de l’échelle qui unit le ciel et la terre dans le sens de la descente. Nos étudiants savent que le cycle naturel de la vie humaine est de 84 ans et que pendant les 42 premières années, l’homme doit descendre vers les réalités matérielles et communiquer le message divin au monde physique, tandis qu’à partir de 42 ans il doit entreprendre les travaux d’identification avec sa personnalité spirituelle.
Cette règle, que nous devrions tous observer, est active dans le processus de génération de la personnalité christique. Si notre personnalité humaine avait suivi le programme établi par notre Ego, 42 incarnations auraient suffit pour faire naître en nous la spiritualité, pour unir nos deux personnalités, la divine et l’humaine. Mais les desseins divins furent modifiés par les Lucifériens, et si d’un côté ces desseins furent accélérés surtout en ce qui concerne les connaissances intellectuelles ( au début de leur intervention ), de l’autre ils provoquèrent la rupture du contact avec les hiérarchies spirituelles. Les hommes commencèrent alors à s’identifier à leur nature physique, en provoquant ainsi un retard inévitable dans leur rythme évolutif. Dans la pratique, nous vivons beaucoup plus que 42 incarnations et les vies de 84 ans se raccourcissent à 60, 50, 40 ans ou parfois moins. Mais ce retard sera largement rattrapé à partir de la naissance de la personnalité christique, car à ce moment-là, nous brûlerons les étapes et atteindrons très rapidement la plénitude spirituelle ; dès lors, la conscience ne nous abandonnera plus au moment de la mort du corps physique et nous serons libres de circuler dans tout l’univers solaire.
6.— D’après le premier chapitre de l’Evangile de Matthieu, la généalogie de Jésus comprend trois parties. La première, formée par 14 générations, va depuis Abraham jusqu’à David. Abraham représente la formation de la conscience, le moment auquel l’homme se rend compte qu’il y a en lui quelque chose de supérieur et d’immortel qui doit assurer sa continuité, sa descendance et sa protection. En Abraham se produit la promesse de l’Union, celle qui se réalisera avec le Christ à la fin des trois étapes.
Dans cette première étape, la « graine » divine est plantée dans l’homme en quinze opérations, puisque David représente la quinzième génération à partir d’Abraham. Nos étudiants d’Astrologie savent qu’il y a quinze étapes zodiacales qui vont du Bélier à la Vierge. Il y a douze signes, mais quinze étapes si nous comptons la transition de l’élément Feu à l’Eau ; de l’Eau à l’Air et de l’Air à la Terre.
Au cours des 14 premières générations, la spiritualité agit depuis l’extérieur. L’homme et la spiritualité suivent des chemins différents, mais parfois ils se rencontrent et alors l’Eternel fait entendre sa voix et commence à former le Peuple Elu qui un jour recevra le Christ. Après la captivité, l’étape d’Egypte, la traversée de la Mer Rouge et la tombée de la Manne, la spiritualité se fixe une demeure provisoire nommée Tabernacle.
7.— La deuxième étape commence avec David et son fils Salomon. Elle est caractérisée par la construction du Temple et ses destructions successives. Il s’agit là d’intérioriser la spiritualité, de lui construire un Temple à l’intérieur de la personnalité humaine afin que Dieu puisse agir en nous. Pour construire cette résidence, les forces qui agissent dans la colonne de Droite de l’Arbre de Vie doivent s’unir aux forces qui circulent à Gauche, et tout le problème consiste à obtenir cette union. Et nous constatons par la suite qu’à peine nous nous sommes fait le propos de construire ce Temple, la trahison se manifeste et aboutit à la mort de l’architecte. C’est le manque de coordination, de bonne entente, qui mènera maintes fois à la destruction de la Demeure. Les différentes Ecoles Initiatiques actives de nos jours s’occupent précisément de récapituler cette construction et elles essuient encore de nombreux échecs.
8.— La troisième étape représente les travaux d’extériorisation de la divinité. Dès qu’il a été intériorisé dans l’homme, Dieu s’empare de la volonté et cela aboutit, à la fin des quinze étapes, à la naissance de la personnalité christique.
9.— Matthieu nous raconte cette naissance ( I, 18 à 23 ), Luc nous en parle également ( I, 26 à 38 ) et il s’agit de l’épisode le plus mal compris par l’Eglise exotérique. Les Ecritures nous disent qu’alors qu’Isabelle en était à son sixième mois de grossesse, l’Ange Gabriel fut envoyé à Marie pour lui annoncer la naissance d’un enfant sans l’intervention d’un homme.
Pour interpréter correctement cet épisode, nous devons considérer que l’Ancien et le Nouveau Testament nous rapportent des faits qui sont alternativement mythiques ou réels. L’Eglise a pris pour une réalité matérielle ce qui est une réalité spirituelle en classant aussi implicitement l’acte de génération, l’acte de reproduction au rang des actes impurs et honteux. En réalité l’acte reproducteur n’est impur que si le couple s’unit dans le seul but d’obtenir de la jouissance.
Mystère de Marie et Joseph
Joseph et Marie représentent l’état d’âme qui précède la naissance de Jésus. Pour que la personnalité mystique puisse naître, il faut d’abord qu’il se produise en nous une régénération qui nous mène à un état de pureté virginale (Marie).
En ce sens, Joseph et Marie sont les deux pôles d’une même réalité spirituelle. Si l’Ange s’adresse à Marie et non à Joseph pour annoncer la naissance mystique c’est parce que la partie féminine est toujours la première à être activée au début de n’importe quel processus . Au début de la création, les forces féminines que la divinité contenait « ’conçurent » notre univers en se laissant féconder par les énergies positives et masculines des entités zodiacales.
Dans ce cas, nous pourrions affirmer également que l’enfant — l’univers naissant — fut engendré sans l’aide d’un mâle et que l’époux de la Vierge — la partie masculine de Dieu — était absent, comme l’était Joseph quand l’Ange annonça la naissance à Marie.
La naissance mystique dans notre for intérieur — un jour l’histoire de cette naissance sera notre propre histoire — ne dépend pas de notre volonté, qui est la partie masculine, mais du fait qu’il existe en nous un terrain vierge, un corps pur sans lequel l’enfant divin ne peut naître. Cette pureté se nomme Marie, c’est la partie féminine de notre psychisme. Cependant, si nous atteignons cet état, c’est parce que notre volonté nous y a poussé, et c’est là que Joseph fait son apparition dans l’histoire, car les Evangiles nous racontent qu’il était veuf et âgé et qu’on lui confia la garde de la virginité de Marie. Joseph représente la volonté qui a créé l’état virginal propice à la naissance de l’enfant divin. Mais dès que cet état a été créé, la naissance a eu lieu sans l’intervention de la volonté- Joseph, mais avec la participation du Saint Esprit, chargé de juger si nous sommes suffisamment préparés pour recevoir l’enfant. Cette partie de l’Evangile nous raconte donc des faits mythiques qui se reproduisent maintes fois quand, lors du 25 Décembre, la personnalité divine naît dans le for intérieur d’un être humain.
10.— Mais la naissance de Jésus est également un fait historique car rien ne peut se produire en nous qui n’ait été vécu auparavant par le monde dans lequel nous vivons. Joseph et Marie sont des êtres humains et leur existence, ainsi que le rôle qu’ils ont joué dans la vie de Jésus, peuvent être étudiés dans les archives Akashiques qui conservent toute l’histoire de la Terre. Selon ces archives, Joseph et Marie furent deux êtres hautement évolués qui s’incarnèrent dans le but de mettre au monde l’enfant qui avait atteint le plus haut degré évolutif sur Terre : Jésus.
Marie s’incarna dans un corps de femme dans l’unique but de réaliser cette mission. Ils avaient dépassé tous deux le stade des désirs sexuels et étaient en condition de concevoir un enfant, non pas motivé par le désir, mais pour remplir une haute mission. Cet enfant qui devrait sauver le monde fut conçu sous la direction des hiérarchies lunaires, gouvernées par Gabriel, chargé de la fécondation.
Mais on peut se demander comment un homme, s’il n’est en proie au désir, peut féconder. A ce sujet, nous tenons à rappeler au lecteur un fait qui a lieu tous les jours à l’aube : les organes masculins se trouvent en état de tension, et aucun sexologue n’a jamais su expliquer ce fait qui arrive aux hommes âgés et même aux impuissants. Il s’agit d’un phénomène spirituel dans lequel les désirs humains n’interviennent pas. C’est à ce moment-là que le couple qui souhaite procréer peut effectuer son union sexuelle d’une façon complètement pure et désintéressée, dans l’unique but de permettre à un être de s’incarner. C’est à ce moment-là également que les grandes âmes qui attendent une occasion pour s’incarner se rendent à la prison terrestre car les êtres hautement évolués ne peuvent pas répondre à l’appel de la passion et du vice.
Joseph fut donc le père matériel de Jésus, c’est pourquoi son nom figure dans la généalogie de Jésus que nous rapporte l’Evangile de St Matthieu, mais l’acte d’engendrer fut programmé par le Saint Esprit, par Binah, le Séphira qui s’occupe des travaux de fécondation par le truchement de la Lune, son véhicule dans ce que nous nommons, en termes cabalistiques, le monde de la formation.
Toute autre supposition est absurde car le système de reproduction que nous utilisons a été organisé par Dieu ; il est donc indispensable que Dieu ait utilisé, dans ce cas-là, un autre système parce que le nôtre lui eût semblé impur.
Du fait qu’elle réalisa l’acte d’engendrer sans passion, Marie ne fut pas « salie », son niveau vibratoire ne fut pas diminué pour autant, et elle continua à être la « terre vierge » dont Jésus avait besoin.
11.— Pour pouvoir s’incarner, Jésus avait, en effet, besoin d’un être exceptionnellement pur. Dans le processus de formation des corps de la pensée et du désir, les âmes, dans leur descente, attirent vers elles des atomes en affinité avec leur nature . Il en est de même pour la construction du corps physique, mais tandis que dans les mondes supérieurs, les atomes viennent du macrocosme, quand on atterrit dans le monde physique, ce n’est pas la terre qui les fournit mais la mère dans laquelle se forme le corps de l’enfant. Si les atomes qui forment le corps de la mère ne vibrent pas à une certaine intensité, l’individu viendra au monde avec des limitations proportionnelles à ce manque d’intensité, et son corps sera plus ou moins exposé à la maladie. Mais soulignons qu’un corps physique à basse fréquence vibratoire ne peut contenir des corps supérieurs à haute fréquence vibratoire. Une grande âme ne peut se loger dans un corps défectueux et imparfait ; si le corps de la mère de Jésus n’avait pas vibré à une haute intensité, il n’aurait pu supporter la charge de la personnalité christique.
Le voyage : un changement d’état de conscience
12.— Le deuxième chapitre de l’Evangile de St Luc commence avec le récit du voyage de Joseph et de Marie enceinte pour se faire inscrire au recensement. C’est là un prétexte qui représente une exigence spirituelle. Chaque fois qu’il se produit un changement d’état d’âme, les écritures racontent que les personnages font un voyage. Caïn voyagea vers la terre de Nod après son crime et Jacob abandonna les terres de Laban quand Rachel fut enceinte de son dernier fils. Ces voyages représentent un changement de terre, de notre terre spirituelle. Le cadre humain dans lequel se déroule notre vie fait partie de notre paysage émotif et mental. Nous pensons, sentons et vivons dans un endroit donné, notre « terre ». Si notre état mental ou émotif change, le cadre, le milieu dans lequel nous vivons ne correspond plus au nouvel état psychique intérieur, il se produira donc rapidement une circonstance qui nous obligera à nous déplacer. C’est pourquoi l’instabilité émotive provoque des déplacements fréquents.
La naissance de Jésus ne pouvait avoir lieu au même endroit où vivaient ses parents auparavant car cette naissance représente un changement d’état intérieur. Dans le cas de Jacob, son dernier fils Benjamin, destiné à compléter et à perfectionner son oeuvre, devait naître dans une terre de liberté. Jésus, au contraire, vint au monde pour réaliser une oeuvre rédemptrice et il devait naître au moment des ténèbres les plus denses et dans la grotte qui symbolise l’obscurité puisque l’objectif de Jésus Christ consistait à faire en sorte que la lumière pénétrât dans les ténèbres.
L’homme et son peuple intérieur
13.— Alors que les bergers veillaient au champs pour garder leur troupeau ( Luc II, 8 à 20 ), un Ange du Seigneur leur apparut pour leur annoncer la nouvelle de la naissance du Sauveur, après quoi ils se rendirent à Bethléhem. Ces bergers représentent les tendances humbles de l’âme humaine, celles qui sont en pleine croissance et qui n’ont pas encore atteint les niveaux du pouvoir de l’âme. Il existe en nous un roi couronné qui règne sur notre volonté ( cf. § 3 ). Ce roi, qui représente la tendance dominante à un moment donné, perd au cours de notre vie son pouvoir au profit d’autres tendances qui le renversent et règnent à leur tour. Ils sont nombreux les souverains qui nous dominent au cours de notre existence. De nouvelles tendances naissent sans cesse en nous, certaines arriveront peut être à régner un jour, tandis que d’autres plus humbles et sans grande influence se rangent du côté de la tendance dominante pour la soutenir, quelle qu’elle soit. Ces tendances forment notre peuple intérieur, elles sont les bergers qui gardent les troupeaux de notre instinct. Le récit nous dit que les gardiens de nos instincts décidèrent de se rendre à Bethléhem pour adorer celui qui un jour serait le roi de leur monde. Si nous jetons un regard rétrospectif sur le christianisme, nous constaterons qu’il s’agit au début, d’une religion d’esclaves, et que les bergers mythiques sont devenus réels, et en défiant tous les pouvoirs, ils défendirent leur foi jusqu’au sacrifice total. Plus tard, ces bergers allaient monter en grade et devenir des rois ; le christianisme devint alors une religion d’état. Toutes les religions doivent traverser les mêmes étapes, et s’il n’y a pas de bergers pour soutenir l’impulsion naissante, celle-ci ne pourra pas prospérer. La tradition a mis en scène cette marche des bergers, dans les crèches de Noël où ils avancent un peu chaque jour, chargés de modestes présents vers la grotte où naît le Sauveur. Les présents symbolisent la partie de notre psychisme représentée par ces bergers.
14.— Si ces « petits bergers », ces hommes de bonne volonté, ont été facile à convaincre, il n’en fut pas de même avec Hérode, qui représente dans le récit mythique le monde conventionnel, les pouvoirs émanant de la vie sociale, avec toutes les valeurs matérielles et le faux bien-être qu’elle implique. La tendance naissante est une menace de mort pour le règne d’Hérode, car, lorsque cette tendance se consolidera et deviendra puissante, Hérode perdra automatiquement son sceptre, autrement dit « Hérode » perdra les voitures de courses, les yatchs, tous les luxes qui font le bonheur d’un homme profane et qui ne nous intéresseront plus. Se sachant menacer par la tendance naissante Hérode essaiera à tout prix de la détruire.
Symbolisme des Rois Mages
15.— Selon l’Evangile, Hérode fut averti par les Rois Mages d’Orient, qui avaient vu briller l’étoile du roi des juifs ( Matthieu II, 1 à 8 ). Ces Rois Mages représentent les trois forces qu’il y a en nous et qui sont capables de tout transformer. Ce sont elles que nous connaissons dans l’Arbre sous le nom de Kether, Hochmah et Binah, et qui se traduisent en nous comme Volonté, Amour-Sagesse et Intelligence active et transformatrice. Ces trois forces se situent à l’Est, à l’Orient, Kether représentant le point par lequel la lumière pénètre en nous. Si ces forces magiques ne se mobilisent pas pour aider la spiritualité naissante, cet enfant n’arrivera jamais à grandir et encore moins à régner. Les Rois Mages annoncent implicitement à Hérode la fin de son règne, et cela a lieu chaque fois que les facultés supérieures qu’il y a en nous tournent le dos à notre nature inférieure en lui annonçant qu’au milieu des ténèbres elles ont vu briller l’étoile de l’enfant-Dieu.
Le mystère du pentagramme
16.— L’étoile de cinq pointes que les Rois Mages ont vu briller est formée par les cinq chemins de 72 jours que l’Aspirant parcourt tous les ans. La divinité a 72 Faces et chacune d’elle comporte un programme qui doit être vécu par l’homme. 72 x 5 = 360, qui sont les degrés du Zodiaque. Les 72 programmes divins nous sont offerts cinq fois par an pour que nous les assimilions. Dès que nous les avons pleinement parcourus, une étoile lumineuse de cinq pointes se forme en nous et attire la lumière qui naît à l’Orient, et cette lumière naissante rejoindra le chemin de lumière formé par l’activation des cinq cycles angéliques. C’est alors que les Rois Mages se mettent en route ; Kether Hochmah et Binah se rendent à Bethléhem dans le monde obscur des désirs, dans la grotte .
17.— Pour aller adorer l’enfant, les Rois Mages doivent traverser inévitablement le royaume d’Hérode, là où a lieu la naissance, sous le nez, pour ainsi dire, du roi qui porte la couronne de notre personnalité profane. Hérode essaie de s’informer auprès des Mages ; mais il n’en reçoit qu’une piste très vague car la personnalité profane et la sacrée s’excluent mutuellement, et elles ne peuvent s’unir sans que se produise la mort de l’une d’elles. Hérode convoqua alors les sacrificateurs et les scribes pour mieux s’informer ; mais ces derniers sont les représentants d’une spiritualité conventionnelle, sclérosée et tournée vers l’extérieur, vers la forme et ils ne peuvent donner qu’une réponse culturelle, rigide, issue des textes des prophètes ; une réponse dépourvue d’énergie.
Hérode fait davantage confiance aux Mages pour trouver son ennemi. S’ils veulent bien lui indiquer le lieu précis où se trouve l’Enfant, lui aussi, il ira l’adorer, dit-il.
Symbolisme des cadeaux des Rois Mages
18.— Les Mages offrent à l’Enfant de l’Or, de l’Encens et de la Myrrhe. L’Or est l’attribut de la Volonté-Kéther, dont la valeur est aussi inaltérable que ce métal précieux. La volonté est une force que rien ne peut altérer. Au cours de notre vie, nous pouvons nous éloigner du droit chemin et obtenir ainsi des expériences pénibles et lourdes en Karma, mais cela ne fera pas obstacle à notre volonté. La volonté est toujours à notre disposition pour réparer, rectifier et modifier le cours de notre vie. Avec l’Or, les Rois Mages offrent les énergies de la volonté, attribut de Kéther-Père, administrées par notre esprit immortel, l’Ego. L’Encens et la Myrrhe représentent les vertus de Hochmah et Binah : la Sagesse et la Force de cristallisation dont l’Oeuvre a besoin.
19.— Après s’être engagés avec la nouvelle personnalité, les Rois Mages ne prennent pas au retour le même chemin qu’à l’aller. Nos facultés supérieures ne peuvent servir deux Seigneurs à la fois, et les Mages laissent de côté le roi Hérode.
L’Egypte, terre de sécurité
Un Ange apparaît en songe à Joseph et lui conseille de se réfugier en Egypte. L’Egypte représente l’état antérieur, d’où est parti le peuple élu vers sa grande aventure spirituelle ; c’est la terre-mère, la terre nourricière, un endroit où l’on se sent en sécurité car il représente ce qui a déjà été conquis et nous appartient ; c’est la ville natale, l’enfance, le passé. Nous avons vu à plusieurs reprises que notre personnalité sacrée et la profane ne doivent pas être confondues, elles ne doivent pas agir ensemble car la profane est plus vigoureuse, ses racines sont plus profondes et, en cas de confrontation, elle a toutes les chances de triompher. Lorsque la personnalité sacrée naît en nous, elle doit se retirer en « Egypte », c’est-à-dire grandir et se développer à l’abri de l’autre. Nous y parviendrons si nous sommes capables de ne pas mélanger les deux personnalités et si nous laissons qu’Hérode règne apparemment en nous pendant un certain temps, tandis que Jésus grandit loin de son influence.
Autrement dit, au cours de la journée, nous devons réserver cinq, dix ou quinze minutes à notre personnalité sacrée destinée à recevoir un jour le Christ. Nous devons vivre ces moments sacrés seul, dans notre chambre ou dans n’importe quel endroit à l’abri des regards ; dans notre « Egypte » particulier. S’il nous est impossible de nous isoler chez nous, nous pouvons utiliser les temples chrétiens, de préférence quand il y a peu de monde ( ou personne ).
Pendant ce laps de temps sacré qui doit servir à fortifier l’enfant divin, les propos profanes doivent disparaître et les disciples doivent agir en pensée, en sentiment et en acte en tant que véritables candidats à la nature divine et étudier la science de Dieu en s’élevant jusqu’à lui par la prière et en essayant de réaliser une oeuvre sainte qui soit à leur portée. Ce temps sacré peut être au début très réduit, tout au plus quelques minutes, mais l’étudiant devra l’augmenter petit à petit dans la mesure de ses possibilités, c’est-à-dire sans gêner, sans perturber ses obligations sociales ou familiales. C’est Hérode qui « fait bouillir la marmite », c’est lui qui nourrit notre entourage et tant que la providence divine ne viendra pas le remplacer, il devra se maintenir à son poste.
La mort d’Hérode ou le déclin de la personnalité profane
20.— Jésus demeure en Egypte jusqu’à la mort d’Hérode ( Matthieu II, 15 ), et cela signifie que le tyran qui règne sur notre vie profane doit mourir un jour ou l’autre : un beau jour, toutes nos obligations familiales et mondaines disparaîtront. Personne n’aura plus besoin de nous au niveau matériel, et nous ne ferons de mal à personne — au contraire — si nous nous éloignons de la vie profane pour vivre à temps complet dans le monde sacré.
Cela ne veut pas dire — loin de là ! — que nous devions nous enfermer dans un couvent pour y vivre la spiritualité, ce n’est nullement ce que fit le Christ, il demeura au contraire tout près du peuple pour l’instruire et le nourrir avec les nouvelles valeurs éternelles de sa doctrine.
La mort d’Hérode marque la fin de nos compromis avec la vie mondaine, la fin de nos appétits matériels et le début d’une vie vouée à la proclamation des valeurs éternelles, des lois cosmiques, et au dépassement de ces lois grâce à l’Amour-Sagesse. Le poste d’Hérode ne peut demeurer vacant, il doit être occupé par l’enfant qui a grandi en Egypte et qui est désormais assez fort pour devenir roi.
La naissance du corps émotif
Le récit du séjour en Egypte se trouve uniquement dans l’Evangile de Matthieu tandis que Luc ( II, 21 à 40 ) nous dit que l’enfant fut présenté au Temple — selon la loi — huit jours après sa naissance, et là il fut reconnu par les prophètes qui prédirent ce que le Royaume du Christ allait signifier. S’il s’agissait de la chronologie d’un fait historique, il y aurait là une contradiction entre les deux Evangiles, mais comme il s’agit d’un récit symbolique, les deux versions se complètent. En effet, nous avons vu que l’Evangile de Luc correspond à l’Eau, aux émotions ; cette version veut donc nous faire comprendre que si d’un côté Jésus devait s’éloigner du monde matériel dans lequel régnait Hérode, de l’autre il devait être présent dans nos sentiments, dans nos émotions, car il y sera reconnu par les tendances qui « voient » le futur, notre futur ; de même qu’il fut reconnu par les « bergers » ou tendances actives en nous au moment de la naissance de l’enfant, mais sans autorité réelle, sans pouvoir. La présentation de Jésus au Temple symbolise la naissance dans le Corps Emotif, tout comme la naissance à Bethléhem correspond à son apparition dans la sphère la plus élevée de notre psychisme, celle du Monde des Emanations. Plus tard, quand Jésus commencera son Oeuvre, nous assisterons à sa naissance dans notre réalité matérielle.
21.— Saint Luc nous dit ( II, 21 ) qu’au huitième jour — régi par Hod — l’enfant devait être circoncis. La circoncision était considérée comme le signe de l’alliance établie entre Abraham et Jéhovah, entre Moïse et Jéhovah. Nous savons que Binah, la sphère régie par Jéhovah, est celle qui institue le sacrifice, qui doit toujours être présent dans tous nos actes. L’homme dans son intégrité physique, n’échappe pas à cette Loi. C’est pourquoi dès sa naissance, on lui arrachait une partie de son corps, c’était la marque de Binah. La femme, qui descend de Binah, n’avait nullement besoin de ce sacrifice car Binah l’a institué dans son organisme par la menstruation et la gestation.
Jéhovah ordonna à Moïse de faire figurer sa marque sur tout ce qui constituait le Peuple Elu, sur les portes de leurs maisons, sur leurs vêtements, sur leur front... afin qu’en voyant constamment ces signes ils ne pussent oublier leur lien avec l’Eternel.
Le Christ vint supprimer toutes ces marques extérieures car la Grâce qu’il représentait devait abolir la Loi, non pas pour l’annuler, mais pour qu’elle fût intériorisée, inscrite dans les coeurs en rendant ainsi inutile sa manifestation extérieure. Selon une ancienne coutume, certaines personnes font un noeud à leur mouchoir pour se souvenir de quelque chose, mais si elles ont besoin de cette astuce, c’est que le coeur n’y est pas, et le cas échéant, même si nous accomplissons les gestes et les rites extérieurs, c’est que la Loi n’a pas pénétré dans nos structures profondes, c’est que nous sommes en dehors de la Loi, malgré les nombreux signes extérieurs qui semblent prouver le contraire.
Les enfants innocents ou les futurs adversaires du Christ.
22.— Selon Saint Matthieu ( II, 16 à 18 ), Hérode envoya massacrer les innocents. Nous disions au §. 13 que les bergers ( les petites gens ) représentaient les tendances humbles qui n’ont encore aucun pouvoir, mais sont déjà assez développées. Elles se mobilisent pour aller à la rencontre du futur roi. Mais il naît constamment en nous des impulsions nouvelles qui un jour dirigeront notre vie et certaines d’entre elles peuvent représenter un danger réel pour le règne du Christ.
Pour qu’Hérode meure un jour en nous et pour que le Christ puisse régner, il faut être sûr qu’Hérode ne trouvera pas un successeur, c’est pourquoi il fait tuer tous les innocents nés à la même époque que Jésus. Ils sont innocents parce qu’ils viennent tout juste de se manifester dans notre nature, qu’ils n’ont encore réalisé aucune action ; ils ne sont encore à l’état d’émanation, mais si nous les laissons grandir, ils deviendront coupables.
Le sacrifice des tendances naissantes est une condition obligatoire, nécessaire pour tout candidat à la naissance christique. En d’autres termes, il s’agit de mobiliser notre pensée exclusivement au service de Dieu. Même si nos gestes et nos sentiments correspondent encore à la personnalité d’Hérode, les pensées qui naissent en nous doivent se consacrer exclusivement au Dessein spirituel afin de ne pas soutenir ni nourrir le règne d’Hérode.
Le fait que ce soit Hérode lui-même qui ordonne de tuer ceux qui devraient le soutenir n’est pas fortuit. Au long de l’histoire du Christianisme, certains empereurs romains, du fait d’avoir tué des innocents, ont contribué au développement des idées chrétiennes autant ou plus que les apôtres. En tuant les innocents, Hérode détruit la base, le fondement de son propre règne, il permet à Jésus de planter la graine et d’enraciner sur place la semence du nouveau Royaume spirituel.
Kabaleb
2 commentaires:
Je n'avais jamais vu les évangiles comme ça. Merci
Ceci explique bien les perpétuelles évolutions de notre personnalité, de notre physique, ne nos besoins matériels, et de notre soif de connaissances spirituelles. Merci d'exposer ainsi les 4 évangiles
Enregistrer un commentaire